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Cours universitaires et travaux de recherche sur les questions d'apprentissage des jeunes et des adultes, science du développement humain, sciences du travail, altérités et inclusion, ressources documentaires, coaching et livres, créativités et voyages. Philippe Clauzard : MCF retraité (Université de La Réunion), auteur, analyste du travail et didacticien - Tous les contenus de ce blog sont sous licence Creative Commons.  

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"Enseigner plus explicitement" semble être un levier efficace pour les apprentissages de tous les élèves, et particulièrement ceux les plus scolairement fragiles, les plus dépendants de l’action du maître, si on en croit les textes récents de l’institution scolaire, mais aussi plusieurs courants de la pédagogie ou de la recherche. "L’explicitation" contribuerait à réduire les inégalités scolaires. Encore faut-il savoir de quoi il s’agit, et quelles controverses ce terme peut susciter. C’est ce que nous tentons ici en précisant les prescriptions institutionnelles, les différents points de vue de chercheurs, en tentant d’illustrer les questions à travers des exemples concrets issus du travail en classe ou en formation.

Depuis quelques années, le vocable « pédagogie explicite » est utilisé par plusieurs courants de recherche au risque de malentendus :

▪ Du côté de ceux qui s’intéressent d’abord à la cognition ou à la didactique des disciplines (issus de différents courants, comme Michel Fayol du laboratoire LAPSCO de Université Blaise Pascal - 1 Clermont-Ferrand, Sylvie Cèbe, Roland Goigoux du laboratoire ACTé de Université Blaise Pascal 2 Clermont-Ferrand), on souligne la nécessité d’outiller, dès la maternelle, tous les élèves des procédures de base (chronologie, repérage dans l’espace, catégorisation, attention, compréhension de l’implicite, développement de la mémoire de travail, phonologie), en comprenant les causes plutôt qu’en se focalisant sur les effets des difficultés des élèves. Ces chercheurs demandent donc aux enseignants de consacrer un temps suffisant aux répétitions, aux verbalisations qui guident l’action, à l’explication collective des conditions de réussite des tâches, parce que « réussir n’est pas comprendre » .

▪ Une autre acception de l’enseignement explicite est popularisée par le canadien Steve Bissonnette, qui prône l’« instruction directe ». Selon lui, les mesures de soutien efficace passent par des actions de dire (rendre explicites les intentions et objectifs de la leçon pour les élèves, rendre explicite les prérequis dont les élèves auront besoin), de montrer (l’enseignant exécute la tâche et énonce le raisonnement adapté à haute voix) et de guider (l’enseignant amène les élèves à rendre explicite leur raisonnement préalable, fournit les rétroactions nécessaires). Les compétences ou les savoirs qui les composent sont décomposés en éléments les plus simples pour que les élèves apprennent progressivement, notamment pour les élèves en difficulté. Trois étapes au cours de la leçon sont donc récurrentes : le modelage (enseigner quoi, pourquoi, comment, quand et où, faire, par une démonstration magistrale) ; la pratique dirigée (proposer des tâches semblables à celles du modelage mais avec des rétroactions régulières et échanges d’idée entre élèves pour s’assurer de leur compréhension) ; la pratique autonome ou indépendante (l’élève réinvestit seul ce qu’il a compris du modelage dans des problèmes ou des questions). 

▪ De leur côté, les chercheurs du laboratoire CIRCEFT-E.SCOL de l’université Paris 8 pensent que 5 l’explicitation est au cœur de la lutte contre les inégalités scolaires. Pour eux, expliciter ne tient pas seulement du dire, du propos, mais de situations explicites. À tâches ou consignes équivalentes, les élèves réinterprètent le sens des situations scolaires. Activisme n’est pas forcément activité intellectuelle : il n’est pas rare qu’un élève réussisse une tâche sans pour autant entrer dans le travail cognitif attendu par l’enseignant, parfois à l’insu de celui-ci. Lorsque ces petits malentendus s’accumulent, les difficultés vont grandissantes. Pour Jean-Yves Rochex , c’est donc en aidant les 6 enseignants à se focaliser sur l’activité intellectuelle des élèves que l'on peut les aider à faire réussir les plus éloignés des réquisits scolaires.

 

 

Suite de l'article ci-dessous :

 

 

Brochure sur l'enseignement explicite

L'exemple de la carte de géographie Stéphane Bonnery a popularisé l’exemple emblématique d’Amidou, en cours de géographie de collège, lors d’une leçon de début d’année ou il s’agit d’apprendre à réaliser une carte en respectant un code de couleurs en fonction des reliefs – les plaines sont en vert et les montagnes en marron.
Pendant toute la séance, l’enseignante essaie d’attirer l’attention des élèves sur ce code, répète que « quand il y a plus de 1000 mètres, on utilise le marron le plus foncé » ou que « si c’est moins élevé c’est moins foncé » … Amidou lui, cherche à bien colorier, « à faire juste ». Il a, depuis le début de sa scolarité, développé une façon de faire que l’on observe souvent, notamment dans des classes d’établissements populaires : seul le résultat compte. Ainsi, comme d’autres élèves, il va harceler l’enseignante : « Madame, cette zone-là, c’est vert ? ». Quand l’enseignante répond : «mais non, je l’ai dit deux cents fois, c’est le marron le plus foncé parce que...», Amidou n’entend que le nom de la couleur et s’empresse de colorier, sans prêter plus d’attention aux explications. Amidou est là pour « faire le travail », c’est-à-dire appliquer des consignes. Il n’imagine pas que cette tâche vise des contenus de savoir : la notion de relief, le codage d’une carte. À l’inverse, pour l’enseignant - qui a été un bon élève – il est très compliqué de comprendre ce que les élèves ne comprennent pas, surtout quand le résultat est correct. Car, à la fin de la séance, Amidou a effectivement bien colorié sa carte. Mais il n’a pas compris pourquoi c’est exact.
Et ce n’est pas à la maison qu’il va mieux le comprendre, ni même pendant l’aide aux devoirs quand il révise pour l’interrogation prévue. Quand quelques jours plus tard, il doit colorier une carte différente – car pour vérifier que les élèves ont bien compris l’enseignante ne donne pas la même carte que celle réalisée en classe – Amidou ne sait pas faire ... Il est même scandalisé : « C’est pas juste, c’est pas la carte qu’il fallait apprendre ! ». Et, quand le chercheur lui demande comment ont fait ceux qui ont réussi, il répond : « Je me demande bien qui leur a dit que ce ne serait pas la même carte le jour du contrôle…»
S. Bonnery, Comprendre l'échec scolaire. Elèves en difficultés et dispositifs pédagogiques, La Dispute,
coll. « L'enjeu scolaire », 2007, 214p.

Document source

L'exemple de la carte de géographie, Stéphane Bonnery

L’élève en difficulté : une chance pour l’Ecole

La marguerite des impressions ou … que reste-t-il d’un apprentissage ?

Le double entonnoir ou … projecteurs sur moments sensibles de séance

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