36 - Repères - répertoire de gestes professionnels
Répertoire de gestes professionnels, une recherche par l'observation à affiner, observation directe, observation participante, observation filmée, auto-confrontation, débriefing, mémoire d'étude...
Première mouture du projet de recherche constitutif d'un répertoire de gestes professionnels qui articulent des dimensions pédagogiques et des dimensions didactiques.
− agir professionnel, Jorro 2002 le définit « selon une perspective dialogique entre les trois dimensions » : approche tactique (trouvailles, astuces, ficelles, tactiques... gestes de bricolage*-braconnage*...), approche stratégique (planification, objectifs, rationalisation, compétences, etc.), approche éthique (valeurs, visions du monde, souci de soi...). Les GP relèvent, selon Jorro, de cette dernière approche.
− actions didactiques : Bronner (ERT, 142) utilise ce terme générique comme équivalent de « gestes professionnels » : « Les prévisions, les anticipations, les interactions effectives avec le système élève-milieu et plus généralement les actions didactiques du professeur dans la dynamique de situations didactiques, nous les nommons les gestes professionnels »
− acte : « Manifestation concrète des pouvoirs d'agir d'une personne, ce que fait une personne. Synon. action (mais envisagée comme un fait ponctuel indépendamment de son déroulement ou de sa durée, et prise au moment où elle se détache du sujet agissant) »
(TLF, en ligne http://www.cnrtl.fr/lexicographie/acte)
− action : « il nous parait important de distinguer activité et action de l’enseignant, afin de ne pas isoler ce que fait l’enseignant, son action, de ce qu’est le métier (en tant qu’il est une construction sociale et culturelle) cadre de son histoire, des formations et de la somme des actions du corps enseignant qui l’ont façonné » Wirthner 2005, 15
« conduite orientée de façon sensée » « comportement signifiant mutuellement orienté et socialement intégré » Weber 1971, « action sensée » Habermas, Ricœur, cités dans Bronckart 1997 : « l’action présente irrémédiablement un statut double : elle peut se définir d’un côté comme cette ‘part’ de l’activité sociale qui se trouve imputée à un humain singulier (point de vue de l’observateur externe) ; et elle peut se définir d’un autre côté comme l’enseignement des représentations construites par cet humain singulier à propos de sa participation à l’activité, représentations qui érigent ce dernier en un organisme conscient de son faire et de ses capacités de faire, c’est à dire en un agent (point de vue interne). Nous soutiendrons que c’est l’agir communicationnel qui, en même temps qu’il est constitutif des mondes représentés, est également l’instrument par lequel se délimitent les actions » Bronckart 1997, 39
− adidactique : dans le modèle de Brousseau, désigne le retrait de l’enseignant de la scène didactique, entre dévolution et institutionnalisation, laissant jouer le seul milieu. Une utopie ? Voir Bronner (ERT 142) citant Margolinas 1994 : « j’ai découvert avec stupeur l’omniprésence du professeur pendant toutes les phases du déroulement des séances »... Toutefois la notion mérite de nous avertir contre une propension à voir l’enseignant partout et tout le temps (conception présente chez le débutant, qui ne souhaite « rien lâcher ») ; d’où quelques problèmes liés : l’enseignant est-il partout ? faut-il qu’il soit partout ? à quel moment doit-il lâcher prise, laisser aller ?
− concept-en-acte : voir invariant opératoire. « Les concepts se développent dans l’action et sous - tendent les formes d’organisation de l’activité que sont les schèmes » (Vergnaud 2001, 20)
− concept pragmatique (invariant conceptuel et stratégique de l’action) : Pastré & Samurçay. 1995
− couplage/configuration : « l’action collective émerge du couplage des actions de plusieurs acteurs. Il y a couplage entre deux (ou plusieurs) actions lorsque une (ou des) préoccupation(s) d’un acteur est (sont) en correspondance avec une (ou des) préoccupation(s) d’un autre acteur. La configuration de l’activité collective est étudiée à partir de l’articulation des préoccupations des acteurs présents » (Veyrunes et al. ERT, 207). Si je comprends bien, couplage au niveau action, configuration au niveau préoccupation. Et la notion d’articulation entre deux acteurs. Veyrunes et al. utilisent aussi le terme d’ajustement dans un sens proche de couplage/configuration : « l’ajustement est défini comme la recherche par un acteur d’une convergence de ses préoccupations avec celles d’autrui, à partir de l’interprétation des attentes d’un autre ou d’autres acteurs » (ERT 2007 ; réf. à Thévenot 1993, absent de la biblio). Ce double emploi d’ajustement est problématique, car il est employé dans un sens très différent dans le modèle ERT de DB. Couplage peut par contre être préféré à ajustement pour désigner la mise en résonance des activités conjointes enseignant-élève, voir enseignant-enseignant (cas de la co-intervention, Veyrunes et al.). Mais la notion est polysémique dans l’état actuel : couplage entre deux ou plusieurs acteurs (Veyrunes supra) ?? / couplage entre les préoccupations des élèves et celles de l’enseignant ? couplage de chaque acteur avec la situation ?? « les gestes d’ajustement sont la manifestation du couplage de l’activité de l’enseignant avec la dynamique de la situation » (Bucheton, communication à OPEN, nov. 2006).
− événement [didactique] (Bucheton 2005), ≠ incident [critique] (Flanagan, 1954, Pastré 1995, 2002), moment critique (Goigoux & Vergnaud 2005). Dans ERT, voir Jean & Etienne, Bronner 145. Voir imprévu et improvisation (Jean & Etienne (ERT 89) ; clinamen. À noter chez Béguin et Clot 2004 : « ce sont les obstacles, les discordances, les conflits objectifs, subjectifs et intersubjectifs rencontrés dans l’activité, qui génèrent une intensité plus ou moins forte de tension, et qui invitent le sujet à mobiliser et à développer les invariants » (Béguin et Clot 2004, 45) « le dialogue est non seulement possible, mais nécessaire justement quand les hommes ne partagent pas les mêmes significations. Ce que nous partageons n’est pas aussi intéressant que ce que nous ne partageons pas » Bender 1998, 193, ibidem
Goigoux et Vergnaud 2005 parlent de « moments critiques » du développement du prof débutant. Jean & Etienne (ERT) reprennent l’opposition imprévu/événement : l’imprévu (Ardoino 1993, Vermersch 1994, Perrenoud 2001, Huber & Chautard 2001) devient événement quand il est repéré et traité par l’enseignant (Blanchard-Laville & Fablet 2002, Legrand 2002 qui le redéfinit comme ce « qui tranche, qui marque une discontinuité ») Jorro 2002 oppose « incident malheureux » – « qui correspond à un modèle de l’action maitrisée et gérée de bout en bout » et « incident catalyseur », « événement libérateur » : « le risque devient une dimension inhérente à [l’] action » (106) « Cette modélisation permet d’expliquer qu’un même imprévu puisse être totalement ignoré par tel enseignant parce qu’il estime ne pas devoir lui donner l’importance qui aurait fait prendre un risque, alors que tel autre n’hésite pas à lui donner dans l’instant le statut d’événement (Jean, 2005) » (ERT 85) « L’imprévu peut donc rester sans suite (ou presque) ou devenir un événement ayant des conséquences sur la situation. C’est la gestion d’un imprévu, qui va faire que celui-ci deviendra un événement, et infléchira effectivement la situation ou restera un imprévu sans suite repérée. Ce sont les acteurs de la situation, et en particulier l’enseignant en tant que garant, organisateur, animateur de cette situation, qui transforment un imprévu en événement. » (ERT 86) « nous nous distinguons par rapport à d’autres approches sur la professionnalisation dans la mesure où l’évènement n’est pas nécessairement ‘l’extra-ordinaire’ ». (Bronner ERT, 142,144) « Nous préférons le concept d’événement à celui d’incident critique d’où il est en partie tiré. L’incident c’est l’accident dont il faut se prémunir. L’événement c’est la vie, la norme de ce qui provoque la dynamique du récit ou de l’interaction. Il ne s’agit pas en classe d’entendre ronronner le moteur » (Bucheton, intro ERT 23). La notion d’événement didactique est-elle plus précise que celle d’événement, élargi à « tout ce qui peut advenir », peut-on se limiter à ce qui est lié aux objets de savoir ? Bucheton parle paradoxalement de « ces imprévus plus ou moins prévisibles » : dès lors, s’agit-il encore d’imprévu ?
− genre: Clot 1999 (La fonction psychologique du travail : genres et styles)
− genres professionnels (Rebière et Jaubert 2005 : « configurations relativement stables d’actions (langagières ou non) dont l’appropriation conditionne la professionnalisation » ; « se caractérisent par un potentiel d’instructions relevant des normes sociales en vigueur dans une sphère d’action concernée (sorte de scénarios complexes), Rastier 1989 »)
− geste (une), n. f., du latin gesta, terme de littérature épique, « action épique », « récit des exploits du héros ». Pour ceux que ça intéresse, Lacan (Le Séminaire V, 1957-1958, éd. Le Seuil 1998, p. 475) réunit, « pour parler du symptôme, le geste et la geste : comme une immédiateté charnelle (une seul instant) douée de profondeur épique (une longue histoire) ». Dans Didi-Huberman 2001, 306.
− geste (un), voir pensée comme geste
− geste, n. m., du latin gestum. Apparait chez Jorro 2000, « geste évaluatif » ? "le sens commun associe à l'idée de geste une intentionnalité qui affecte son destinataire lorsque l'expression "c'est le geste qui compte" souligne l'empreinte d'une pensée, la reconnaissance d'une dimension symbolique l'emportant sur une approche utilitariste et passagère. Le geste n'est pas seulement gesticulation ou bien encore mouvement stéréotypé et reproductible. Il possède une intensité. Bien qu'éphémère dans sa réalisation, il laisse des traces. Le geste commence là où l'utilitarisme finit" (Jorro 2000, 47)
− geste d’étude (Jorro, cf 2005)
− geste de bricolage (« ne remet pas en cause les outils en circulation » Jorro 2002) /vs/
- geste de braconnage (« avec les gestes de braconnage, le praticien entre en dissidence » ibid., 31 ) : une gradation possible de l’ajustement docilité vs insolence (Jorro, 32)
− geste de métier. Terme d’ergonomie, cf. Fernandez, G. (2001). Le corps, le collectif et le développement du métier. Étude clinique d'un geste de métier à la SNCF. Éducation permanente, 146, 27-35. cité dans Béguin & Clot 2004
− geste du métier (Sensévy 2005), Larguier dans REF, 136. Dans Jorro : (Jorro 2002 et 2004) ; « Par gestes du métier, il importe de comprendre gestes codifiés, répertoriés dans la mémoire du métier et de saisir leur effet structurant dans l'activité. » (Jorro 2002).
− geste professionnel, dans Jorro 2002 ; « les gestes professionnels complètent l’approche des gestes du métier en intégrant des dimensions plus singulières, en particulier :
– des dimensions biographiques, existentielles, qui relèvent du sens postural ;
– des indices de reconnaissance d’autrui, de son affectivité et de son émotivité ;
– des signes de son univers symbolique, éthique » (Jorro 2002, 75)
− invariants opératoires : dans le modèle de Vergnaud, désigne les concepts-en-acte et les théorèmes-en-acte, forme opératoire de la connaissance, non verbalisée, à la différence de la forme prédicative de la connaissance, exprimée dans un registre sémiotique, verbal, ou autre (graphique...)
« Le système d’invariants opératoires : Il s'agit du système de concepts-en-acte et de théorèmes-en-acte qui permet de penser le réel et d’agir. Les concepts se développent dans l’action et sous tendent les formes d’organisation de l’activité que sont les schèmes. Il n’y a pas d’action possible sans propositions tenues pour vraies sur le réel. Ce sont justement ces propositions tenues pour vraies que j’appelle théorèmes-en-acte, y compris pour d’autres domaines d’activité que les mathématiques. Leur portée est souvent locale (elle l'est toujours dans la phase d'émergence); ils peuvent rester implicites; ils peuvent même être faux » (Vergnaud 2001, 20)
− phronèsis, voir kaïros : de phrèn dérive encore le verbe phronein, qui veut dire « avoir la faculté de sentir et de penser », d'où « vivre », puis « être dans son bon sens, penser, être avisé, prudent ». La phronèsis, c'est l'acte de celui qui est capable de phronein. C'est donc la pensée, le sentiment, la capacité à comprendre quelque chose, la raison, la sagesse, l'intelligence, et plus spécifiquement, la prudence, la sagesse pratique. On voit donc que ce mot empiète sur les sens de nous (intelligence, pensée), de logos dans son sens de « raison », de sophia (sagesse), voire de sôphrosunè (tempérance, prudence), ce qui rend délicat de le traduire par l'un de ces mots. Le mot « prudence » a de nos jours le plus souvent un sens trop restrictif, plus défensif (idée de précautions à prendre, surtout pour sa sécurité) qu'actif.
− postures (Bucheton & Bautier, 1997) : « des formes de l’activité socialement et scolairement pré-construites qui se manifestent dans diverses conduites en partie inconscientes dans l’accomplissement des tâches d’écriture ou de lecture », REF.
− praxis : Synonymes pour Chevallard : « une manière de faire (...), une technique (du grec technè, « savoir-faire »), une praxis » (Chevallard 2003, 3)
− préoccupation : « dans la théorie du cours d’action (Theureau), à chaque action élémentaire correspond une ou plusieurs préoccupations. Elles sont liées à l’ensemble des possibles ouverts pour l’acteur en fonction de son histoire et sont précisées dans l’action » (Veyrunes, ERT p. 207)
- schème d’action (Dufays 2005, 11 : « relèvent davantage de la logique abstraite, globale, conceptuelle »)
− schème préréflexif disponible (« Ce ne sont donc pas seulement des manques qui caractérisent les difficultés de ces élèves réfractaires mais des rapports à des représentations en actes du
« comment faire », des schèmes pré-réflexifs disponibles » (REF)
− schème professionnel : « une forme organisée et stabilisée de l’activité d’enseignement pour une certaine variété de situations appartenant à une même classe » (Goigoux & Vergnaud 2005)
− schèmes sociaux d’utilisation (Rabardel 1995), schèmes sociaux formant le genre professionnel (Clot 1999)
− style [professionnel] Clot 1999, Clot et al., 2000, Bru 2004, Perrenoud 2001, Jorro 2002 pp. 90 sq. « Le style est un « mixte » qui décrit l’effort d’émancipation du sujet par rapport à la mémoire impersonnelle et par rapport à sa mémoire singulière, effort toujours tourné vers l’efficacité de son travail » (Clot et al., 2000) ; « le style professionnel n’est pas seulement une affaire de technique, c’est aussi un lieu d’affectivité et d’émotions » (Jorro 2002, 111)
− travail : Meyerson : « activité forcée »1948, idem Wallon, activité dirigée (Clot).
− schème (Kant, Revault d’Allonnes 1920, Piaget 1936). Au cœur du modèle de Vergnaud en did des maths. Une présentation vulgarisée dans Vergnaud 2001. Dans Goigoux & Vergnaud 2005, on a un exemple appliqué à une séance d’apprentissage de la lecture. « si l’analyse des schèmes suppose l’ana des conduites en situation, les schèmes ne sont pas pour autant des conduites, ce sont des constituants de la représentation » Goigoux & Vergnaud 2005, 9
« Un schème est donc une totalité dynamique fonctionnelle qui organise le déroulement dans le temps et dans l'espace des gestes instrumentaux du bébé. Plus précisément, c'est une organisation invariante de l'activité pour une classe de situations définie. L'invariance caractérise l'organisation et non l'activité ; le schème n'est pas un stéréotype ; il permet au contraire de traiter la contingence et la nouveauté, ce qui ne serait pas le cas s'il s'agissait d'un stéréotype S'adressant à une classe de situations, c'est un universel. Pour étudier l'activité des individus, notamment les pratiques des enseignants, il est donc nécessaire d'identifier les différentes catégories de situations auxquelles ils sont confrontés - même si les limites de ces catégories ne sont pas hermétiques, ni rigoureusement définies.
Un schème comprend nécessairement quatre composantes : - un but (ou plusieurs), des sous-buts et des anticipations ;
- des règles d'action, de prise d'information et de contrôle, qui s'avèrent décisives pour sélectionner l'information pertinente et générer les actions au fur et à mesure : par exemple lorsqu'un enseignant se trouve face à de nombreux élèves, qui prennent la parole de manière désordonnée ;
- des invariants opératoires, c'est-à-dire des théorèmes-en-actes (propositions tenues pour vraies sur le réel) et des concepts-en-actes (concepts pertinents pour la construction de ces théorèmes-en-acte) ;
- des possibilités d'inférence. »
Vergnaud, La conceptualisation, clef de voûte des rapports entre pratique et théorie, en ligne sur EDUSCOL :
http://eduscol.education.fr/D0126/appe_vergnaud.htm
« Je rappelle donc brièvement mes quatre définitions du concept de schème, de la moins analytique à la plus analytique, puis à la plus formelle :
1) un schème est une totalité dynamique fonctionnelle.
2) un schème est une organisation invariante de l'activité pour une classe définie de situations. 3) un schème est nécessairement composé de quatre catégories de composantes
- un but (ou plusieurs), des sous buts et des anticipations
- des règles d'action, de prise d'information et de contrôle
- des invariants opératoires, (concepts-en-acte et théorèmes-en-acte)
- des possibilité d'inférences.
4) un schème est une fonction qui prend ses valeurs d'entrée dans un espace temporalisé à n dimensions et qui produit ses valeurs de sortie dans un espace également temporalisé à n dimensions : n et n' étant très grands. »
(Vergnaud 2001, 5)
Extrait du Glossaire de Jean-Charles Chabanne
http://perso.ens-lyon.fr/jean-charles.chabanne/jtudGP_site/Glossaire_gestes_professionnels.pdf
Extrait du Glossaire en ligne de Jean-Charles Chabanne
http://perso.ens-lyon.fr/jean-charles.chabanne/jtudGP_site/Glossaire_gestes_professionnels.pdf