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Cours universitaires et travaux de recherche sur les questions d'apprentissage des jeunes et des adultes, science du développement humain, sciences du travail, altérités et inclusion, ressources documentaires, coaching et livres, créativités et voyages. Philippe Clauzard : MCF retraité (Université de La Réunion), auteur, analyste du travail et didacticien - Tous les contenus de ce blog sont sous licence Creative Commons.  

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Cet article présente la formation en situation de travail. Celle-ci s'inspire largement des thèses de l'ergonomie et de la didactique professionnelle. L’action de formation en situation de travail (AFEST) ne peut être réduite à un apprentissage « sur le tas ». Sa mise en œuvre doit relever d’une nouvelle forme d'ingénierie de formation plus orientée par les principes de la didactique professionnelle. Il est en effet affirmé et amplifié le principe d'un apprentissage par et dans les situations de travail : apprendre des situations de travail dans celles-ci et par celles-ci. Il s'agit d'un vrai changement de paradigme, qui convoque des outils de l'analyse du travail.

L’AFEST, un nouvel enjeu…

L’action de formation en situation de travail est un dispositif formel

Dans tous les cas, comme l’indique le rapport de synthèse (http://travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/synthese- rapport-afestvf.pdf), la formation en situation de travail « s’articule autour d’un noyau dur structuré par l’alternance de deux séquences distinctes, mais articulées et réitérées autant de fois que nécessaire pour produire les apprentissages visés :

une mise en situation de travail préparée, organisée et aménagée à des fins didactiques,

une séquence réflexive, en rupture avec l’activité productive, animée par un tiers. »

Ainsi que le précise le rapport complet (http://travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/rapportfinalafest.pdf), « l’enjeu de l’action de formation en situation de travail est de « mettre de la formation dans le travail » – et non plus de considérer la situation de travail comme le moyen « d’appliquer » ce qui a été vu en formation. « La pédagogie de l’AFEST fait des mises à situation (...) le matériau même de la formation (...) ».

L’AFEST ne nous renvoie donc pas à l’univers des apprentissages informels, qui s’effectueraient « magiquement » par la simple mise en situation :

Un ou plusieurs objectifs professionnels sont expressément visés, les situations pour y parvenir sont identifiées et agencées en parcours,
Et

L’apprenant est accompagné dans sa réflexion sur son activité.

Ainsi, l’AFEST fait du travail le « matériau » des apprentissages, mais non un matériau qui se suffirait à lui- même.

 

Baliser par avance un parcours vers un ou plusieurs objectifs ne signifie pas qu’il n’y ait pas de place pour l’imprévu. La richesse de l’AFEST vient justement de son apport précieux en savoirs tacites, de l’immersion dans « le réel » et les problèmes tels qu’ils se posent vraiment.

 

Des séquences réflexives outillées

Il y a donc les situations de travail, et des temps de réflexion accompagnée sur l’activité. Ces temps de réflexion ne sont pas des échanges informels, ils doivent être outillés au moyen de deux types de support :

- Des « supports témoins de l’activité », que le rapport nomme « traces de l’activité » : carnet de bord, enregistrement vidéos, reconstitution orale par l’apprenant ou par un «témoin » ...
- Des « supports constituant des références extérieures à l’activité », qui donnent le « prescrit » : « ce qui devrait être fait ». Ce peuvent être des référentiels, des fiches de postes, des normes ...

L’apprenant ne peut être laissé seul pour mener à bien cette réflexion, l’accompagnement par un tiers est indispensable et demande à être professionnalisé.

 

La formation en situation de travail requiert une ingénierie spécifique

Le rapport de synthèse en indique les moments clés :

- Diagnostic d’opportunité ;
- Diagnostic de faisabilité. Celle-ci reposant sur l’engagement des parties prenantes et sur la prise en compte des contraintes liées à l’activité ;
- Détermination des compétences visées, prenant en compte le positionnement initial des apprenants ;

- Repérage et analyse du potentiel formateur des situations de travail – une situation de travail n’ayant pas forcément de potentiel formatif ... ;
 

Définition du parcours : si possible, agencement des situations de travail « dans une logique de complexité croissante et progressive », répétitivité pour entraîner, « sanctuarisation » de la disponibilité du formateur, y compris pour ses temps de préparation.

Le rapport complet (http://travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/rapportfinalafest.pdf) illustre par des exemples chacune de ces étapes.

Selon les cas, il a été nécessaire de mettre en œuvre des outils complémentaires, par exemple :

- pour constituer la référence de ce qui est attendu dans l’activité- celle-ci devant représenter un enjeu et être appropriée par l’ensemble des parties prenantes : travail à partir de référentiels ou modules existants, interviews des parties prenantes...
- pour repérer les situations de travail supports de formation : interviews, observations en situation...

L’implication des professionnels expérimentés, ceux qui connaissent le « travail réel » visé par l’action, est ici indispensable.

 

Apprendre implique d’avoir droit à l’erreur et à l’hésitation.

Ceci implique souvent d’aménager la situation de travail, afin :

de sécuriser le droit à l’essai (pour la couture sur peau de crocodile, très coûteuse, par exemple ...), de desserrer les contraintes organisationnelles (le temps, par exemple) sans pénaliser le client final et dans des limites acceptables pour l’employeur.

 

La pleine reconnaissance de la situation de travail comme lieu d’apprentissage ouvre un nouveau champ aux services et aux organismes de formation, plus en lien avec les métiers, au plus près du travail réel. Il leur appartiendra de faire respecter ce qu’est réellement l’AFEST, et ses conditions de réussite.

 

Extraits de l'article de Mathilde Bourdat

paru sur le site : formation-professionnelle.fr

https://www.formation-professionnelle.fr/2018/08/31/action-de-formation-en-situation-de-travail-afest-de-quoi-parle-t-on/

L’entreprise lauréate des Digital Learning Excellence Awards de 2018, Adisseo, a mis en œuvre pour les nouveaux entrants un dispositif de ce type, mêlant astucieusement Formation en situation de travail – Accompagnement – Formation à distance. Voir la vidéo ci-dessous et la présentation du dispositif et de son évaluation.

L’AFEST, ne pas se tromper d’enjeu… par Paul Santelmann 
L’expérimentation sur la formation en situation de travail a permis d’élargir la notion d’action de formation à des processus organisés de développement de compétences mis en œuvre dans l’entreprise. Mais l’expérimentation a surtout mis en exergue la nécessité d’une ingénierie minimale pour que cette démarche soit utile à l’entreprise, aux salariés concernés et qu’elle puisse être reconnue comme composante des différentes façons pour l’entreprise de répondre aux objectifs de l’entretien professionnel. Depuis on voit fleurir une offre de prestations destinées à développer les AFEST ou à « labelliser » des tuteurs ou des formateurs occasionnels d’entreprise susceptibles de les organiser. Ces prestations se réduisent généralement à éditer des guides pratiques et/ou à dispenser en quelques jours des conseils méthodologiques qui valent en réalité pour tout type d’action de formation professionnelle… Car former par des mises en situation n’a rien d’innovant, l’AFPA s’est construite autour d’une méthode de reproduction des situations de travail expérimentée dans les années 30 ! En réalité si toute AFEST nécessite de maitriser les basiques qui permettent d’organiser un processus réussi d’apprentissage par des mises en situation (analyse de l’activité, traduction didactique et séquences réflexives), les principales conditions de son développement tiennent dans le modèle social et économique susceptible d’inciter les entreprises à se doter de ressources formatives intégrées et d’opter pour des organisations apprenantes. L’expérimentation AFEST a permis de « déverrouiller » un obstacle réglementaire dans un contexte global de réinternalisation des fonctions formatives au sein du système productif. Mais ce mouvement de fond s’est essentiellement déployé jusqu’à présent selon des modes plutôt classiques empruntés aux organismes de formation (entreprises dispensatrices de stages, alternance juxtaposée, tutorat d’application, universités d’entreprises dédiées aux cadres, processus informels, e-Learning descendant, etc.). L’intérêt des AFEST c’est de s’attaquer à des questions qui n’ont pas été résolues par notre système de « stagification » de la transmission des savoirs professionnels. Un système qui n’a pas su réduire la dévaluation des acquis expérientiels et la sous-estimation des potentiels d’apprentissage de millions d’adultes considérés comme peu qualifiés et discriminés à l’embauche. L’implication des collectifs de travail dans le portage de processus de formation internalisés ne relève pas d’un simple transfert de modalités pédagogiques au sein des entreprises mais d’une autre façon d’aborder et d’analyser les activités professionnelles. Cela suppose une implication des employeurs, des salariés et de leurs représentants et des apports en ingénierie des compétences. Une ingénierie des compétences suppose une expertise intersectorielle des métiers permettant : · De nouer un dialogue constructif avec les entreprises sur la façon dont on peut intensifier méthodiquement le développement des compétences en situation. · D’identifier le potentiel de transférabilité des compétences (techniques ou transversales) détenues par les salariés dans une logique de renforcement de leur employabilité. Il s’agit bien d’une révolution culturelle dans un pays où l’externalisation de la formation continue a été plus poussée qu’ailleurs et où le potentiel formatif du travail a souvent été minoré. La persistance des difficultés de recrutement dans de nombreux secteurs malgré le chômage de masse est une illustration du décalage entre le système institutionnel de formation, pourtant sur-développé (plus de 70 000 prestataires de formation !), et les besoins en compétences des actifs et des entreprises. C’est en se concentrant sur les salariés les moins qualifiés ou les chômeurs mobilisés dans les différents dispositifs de réinsertion par le travail que les AFEST pourront devenir un levier de transformation des pratiques de recrutement, d’intégration, de professionnalisation et de développement des compétences des entreprises. Mais cette démarche concerne également la question des mobilités professionnelles facilitées par une meilleure reconnaissance des proximités entre métiers. En cela les AFEST ne se réduisent pas à un enfermement dans un poste de travail mais bien à une contribution à l’évolution professionnelle des salariés. Paul Santelmann
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