Dix minutes de méditation par jour améliorent l’efficacité du cerveau
Pratiquer la méditation de pleine conscience pendant dix minutes par jour améliore la concentration et la capacité à garder une information « active » dans le cerveau, une fonction cérébrale dénommée « mémoire de travail ». La méditation de pleine conscience rend le cerveau plus efficace : se concentrer et utiliser la mémoire de travail demande ensuite à ce dernier moins de ressources.
Les grandes déclarations sur les effets de la méditation sont légion, mais trop souvent, les preuves scientifiques qui les étayent sont limitées, voire inexistantes. Dans notre dernière étude, publiée dans la revue Scientific Reports, nous nous sommes penchés sur plusieurs lacunes des recherches précédemment menées sur ce sujet, pour déterminer avec davantage de certitude ce qui change lorsque les gens méditent.
En collaborant avec des collègues de l’Université d’Osnabrück en Allemagne, nous avons effectué une étude contrôlée randomisée afin d’étudier les effets de la méditation de pleine conscience sur les fonctions cognitives importantes pour la vie quotidienne.
Pour notre étude, nous avons créé deux groupes dans lesquels nous avons réparti aléatoirement 34 participants. Durant huit semaines, l’un des deux groupes a pratiqué la méditation de pleine conscience, tandis que l’autre groupe – le groupe contrôle – s’est livré à des exercices de relaxation musculaire.
L’utilisation de contrôles dits « actifs » – où tous les membres du groupe doivent exécuter une même tâche, plutôt que de ne rien faire – permet d’éliminer de nombreuses causes (autres que la méditation) pouvant être à l’origine de changements dans les performances cognitives. Par exemple, le seul fait d’être sélectionné pour faire partie de l’expérience ou de se mettre à de nouvelles activités pourrait améliorer les performances des personnes concernées, sans qu’il ne s’agisse d’un effet de la méditation de pleine conscience.
Nous nous sommes également penchés sur d’autres limitations des recherches antérieures. Par exemple, dans certaines études, les tâches cognitives étaient si simples que tous les participants, expérimentaux comme contrôles, atteignaient un niveau optimal, ce qui éclipsait les effets potentiels de la méditation. Parfois, les participants n’avaient besoin que de distinguer et de répondre à quatre stimuli différents qui apparaissaient à plusieurs reprises sur un écran, l'un après l'autre. Rapidement, tous les participants avaient optimisé leur performance… Pour éviter cet écueil, nous avons employé la très difficile tâche de suivi d’objets multiples.
Cet exercice consiste à suivre deux à cinq disques (« cibles ») qui se déplacent sur un écran d’ordinateur, parmi 16 disques identiques se déplaçant également sur l’écran. Les participants doivent se concentrer sur les disques cibles sans se laisser distraire par les disques non ciblés.
Les membres des deux groupes ont été soumis à cette tâche quelques jours avant et après avoir pratiqué soit la méditation de pleine conscience, soit des exercices de relaxation, et ce durant huit semaines (durant cette période, les membres du groupe de méditation méditaient environ quatre fois par semaine).
Dans le groupe de méditation, l’exactitude du suivi des cibles a augmenté d’environ 9 % – un changement statistiquement significatif – montrant que leur concentration et leur mémoire de travail s’étaient améliorées. Les performances des participants au groupe contrôle ne se sont pas améliorées du tout.
Un cerveau plus efficace
Pour déterminer ce qui a changé dans le cerveau des personnes qui méditaient, nous avons enregistré l’activité cérébrale des participants grâce à un électro-encéphalogramme (EEG), pendant qu’ils se livraient à l’exercice. Nous avons combiné cette approche avec une méthode dont nous avons été les pionniers voici 15 ans : la commutation rapide (on/off) des disques mobiles, à la fréquence de 11 Hz. Leur scintillement continu engendre un signal cérébral appelé steady-state visually evoked potential (SSVEP – Potentiel évoqué visuel stationnaire). En clair, le cerveau génère une activité électrique dont la fréquence est la même que celle des disques scintillants. Ce signal est ensuite capté par l’EEG.
Nous avons découvert qu’après huit semaines d’entraînement le signal SSVEP était réduit d’environ 88 % – et à nouveau, seulement dans le groupe de méditants. Grâce à de précédents travaux, nous savons ce que signifie cette réduction. Les réseaux cérébraux impliqués dans le suivi des disques se sont affinés, de sorte que le cerveau a besoin de moins de ressources pour accomplir cette tâche.
Une technique simple
La plupart des recherches sur la méditation consciente mettent en place des programmes complexes, comme ceux visant à la réduction du stress grâce à la pleine conscience. Cependant, étant donné que ces programmes incluent la pratique yoga, des étirements et différents types de méditation, il est impossible de dire si les améliorations signalées sont vraiment le résultat d’une pratique de méditation particulière.
Pour plus de clarté, nous avons demandé au groupe de méditation de ne faire qu’un seul exercice de méditation simple pendant dix minutes par jour. Cet exercice s’appelle méditation sur le souffle en pleine conscience. Il s’agit de se concentrer sur la sensation provoquée par votre respiration – par exemple, l’air qui coule dans et hors de vos narines. Si des pensées, des sentiments ou d’autres impressions provoquées par vos sens surgissent, il vous faut simplement en prendre acte, puis vous reconcentrer sur votre souffle, sans vous intéresser à la distraction qui vient de se produire ou y penser davantage.
Il est curieux que le simple fait de se focaliser sur son propre souffle, de manière équilibrée, puisse avoir un tel effet sur la concentration et la mémoire de travail. Selon nous, cela se produit parce que la méditation constitue une forme d’entraînement du réseau cérébral. Les mêmes réseaux, activés de façon répétitive au sein du cerveau, deviennent plus efficaces. Il semblerait que cette forme de méditation cible les réseaux cérébraux centraux, des régions du cerveau interconnectées qui travaillent ensemble et jouent un rôle clef dans de nombreuses tâches cognitives.
L’intérêt de ces résultats pour la vie quotidienne est évident. Rester concentré, distinguer les informations importantes de celles qui ne font que nous distraire et les garder en mémoire sont des compétences importantes dans un contexte de surcharge d’information. Il a notamment été montré que les opérateurs de radars y parviennent mieux que les autres, tout comme, à un niveau plus terre-à-terre, les personnes qui pratiquent les jeux vidéo rapides.
Alors, commençons : « Nous ressentons sur le bout de notre nez le courant de l’air informe qui nous entoure, et nous laissons les pensées, les sons et les sentiments passer à travers nous sans aucune évaluation… »
Peter Malinowski, Reader in Cognitive Neuroscience, Liverpool John Moores University
Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.
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Article republié de The Conversation.com