Situations-problèmes : regards croisés d’Astolfi et Meirieu
Pour le conseil pédagogique, comme support de formation pédagogique... lisez et pensez, debattez les extraits suivants.
- Qu’est-ce qu’une situation problème ?
La situation-problème est une situation d’apprentissage. C’est un moyen d’apprentissage et non le résultat. C’est une stratégie d’enseignement qui favorise l’engagement des élèves.
Elle permet la construction des savoirs.
La situation-problème, c’est une tâche : globale, complexe, signifiante. La situation-problème est une tâche globale : elle est complète, c’est-à-dire qu’elle a un contexte (des données initiales) et qu’elle contient un but ; elle requiert plus d’une action, plus d’une procédure ou plus d’une opération à faire ; elle pourrait être décomposée en plusieurs parties ou éléments.
La situation-problème est une tâche complexe : elle fait appel à plusieurs connaissances et à plus d’un type de connaissances (déclaratives, procédurales et conditionnelles) ;
elle amène un conflit cognitif, la solution n’est pas évidente ;
elle présente un défi à la portée de l’élève (réaliste et réalisable) ;
elle peut toucher à plusieurs objectifs du programme, elle est donc très structurée sur le plan didactique puisqu’elle est créée en fonction d’un apprentissage précis.
La situation-problème est une tâche signifiante :
elle a un sens pour l’élève parce qu’elle fait appel à quelque chose qu’il connaît, elle est en lien avec sa réalité ;
elle est concrète parce qu’elle a un but (un produit), qu’elle sollicite une action réelle et qu’elle requiert l’utilisation des connaissances, des techniques, des stratégies ou des algorithmes.
Les caractéristiques d’une situation-problème :
Elle contient des données initiales qui précisent le contexte de la situation et qui sont utiles pour résoudre le problème. - Il y a un but à atteindre (différent de l’objectif d’enseignement) qui donne un sens à la mobilisation et à l’organisation des connaissances. - Il y a des contraintes ou des obstacles à surmonter qui exigent une réorganisation des connaissances antérieures et qui amènent l’élève à trouver d’autres moyens, donc à faire des apprentissages. - La démarche et la solution ne sont pas évidentes ; la personne doit faire une recherche cognitive active pour savoir comment procéder.
Les avantages de la situation-problème :
Elle permet aux élèves de faire de réels apprentissages en les plaçant au coeur du processus d’apprentissage.
Elle sollicite l’engagement des élèves ; ils deviennent davantage acteurs puisqu’ils utilisent leur bagage cognitif, leur intelligence.
Que dit Meirieu de la situation problème ?
La situation-problème selon Meirieu : « Un sujet, en effectuant une tâche, s’affronte à un obstacle. »
Le sujet est orienté par la tâche, le formateur par l’obstacle Le franchissement de l’obstacle doit représenter un palier dans le développement cognitif su sujet L’obstacle est franchi si les matériaux fourni et les consignes données sucitent l’opération mentale requise Pour effectuer une même opération mentale, chacun doit pouvoirutilier une stratégie différente La conception et la mise en oeuvre de la situation-problème doivent être régulées par un ensemble de dispositifs d’évaluation
Ce n’est pas une « Pédagogie de la réponse » mais une « Pédagogie du problème »
Quelles questions à se poser avant l’élaboration d’une situation-problème ?
Quel est mon objectif ? Qu’est-ce que je veux faire acquérir à l’apprenant qui représente pour lui un palier de progression important ?
Quelle tâche puis-je proposer qui requière, pour être menée à bien, l’accès à cet objectif (communication, reconstitution, énigme, réparation, résolution, etc.) ?
Quel dispositif dois-je mettre en place pour que l’activité mentale permette, en réalisant la tâche, l’accès à l’objectif ?
Quel matériau, documents, outils dois-je réunir ?
Quelle consigne-but dois-je donner pour que les apprenants traitent les matériaux pour accomplir la tâche ?
Quelles contraintes faut-il introduire pour empêcher les sujets de contourner l’apprentissage ?
Quelles activités puis-je proposer qui permettent de négocier le dispositif selon diverses stratégies ? Comment varier les outils, démarches, degrés de guidage, modalités de regroupement ?
Tiré de Phillippe Meirieu, Guide méthodologique pour l’élaboration d’une situation-problème.
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Qu'est ce que la situation-problème selon Astolfi ?
1 Une situation-problème est organisée autour du franchissement d’un obstacle par la classe, obstacle préalablement bien identifié.
2 L’étude s’organise autour d’une situation à caractère concret, qui permette effectivement à l’élève de formuler hypothèses et conjectures. Il ne s’agit donc pas d’une étude épurée, ni d’un exemple ad hoc, à caractère illustratif, comme on en rencontre dans les situations classiques d’enseignement (y compris en travaux pratiques).
3 Les élèves perçoivent la situation qui leur est proposée comme une véritable énigme à résoudre, dans laquelle ils sont en mesure de s’investir. C’est la condition pour que fonctionne la dévolution : le problème, bien qu’initialement proposé par le maître, devient alors "leur affaire".
4 Les élèves ne disposent pas, au départ, des moyens de la solution recherchée, en raison de l’existence de l’obstacle qu’il doit franchir pour y parvenir. C’est le besoin de résoudre qui conduit l’élève à élaborer ou à s’approprier collectivement les instruments intellectuels qui seront nécessaires à la construction d’une solution.
5 La situation doit offrir une résistance suffisante, amenant l’élève à y investir ses connaissances antérieures disponibles ainsi que ses représentations, de façon à ce qu’elle conduise à leur remise en cause et à l’élaboration de nouvelles idées.
6 Pour autant, la solution ne doit pourtant pas être perçue comme hors d’atteinte pour les élèves, la situation-problème n’étant pas une situation à caractère problématique. L’activité doit travailler dans une zone proximale, propice au défi intellectuel à relever et à l’intériorisation des "règles du jeu".
7 L’anticipation des résultats et son expression collective précèdent la recherche effective de la solution, le "risque" pris par chacun faisant partie du "jeu".
8 Le travail de la situation-problème fonctionne ainsi sur le mode du débat scientifique à l’intérieur de la classe, stimulant les conflits socio-cognitifs potentiels.
9 La validation de la solution et sa sanction n’est pas apportée de façon externe par l’enseignant, mais résulte du mode de structuration de la situation elle-même.
10 Le réexamen collectif du cheminement parcouru est l’occasion d’un retour réflexif, à caractère métacognitif ; il aide les élèves à conscientiser les stratégies qu’ils ont mis en œuvre de façon heuristique, et à les stabiliser en procédures disponibles pour de nouvelles situations-problèmes.
Tiré de Jean-Pierre Astolfi, Placer les élèves en "situation-problème" PROBIO-REVUE, vol. 16, no 4, décembre 1993